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La République universelle ou adresse aux tyrannicides

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Jean-Baptiste de dit Anacharsis CLOOTS

La République universelle ou adresse aux tyrannicides

Chez Les Marchands de nouveautés, Paris An IV de la rédemption (1792), in-8 (12,5x20,5cm), (2 p.) 196 pp., relié.


| L'encre versée par l'Orateur du genre Humain |



Très rare édition originale.
Reliure en demi-veau fauve, dos lisse orné de fleurons et de doubles filets dorés, quelques frottements sur les mors, plats de cartonnage moutarde, gardes et contreplats de papier à la cuve, tranches mou­chetées. Coiffe de tête absente (comme il se doit), mors frottés et quelques épidermures.
Annotation manuscrite à la plume d'un ancien propriétaire en regard de la page de faux-titre concernant l'auteur : condamné à mort le 24 mars 1794. »
Rarissime envoi autographe d'Anacharsis Cloots au révolutionnaire Nicolas Joseph Pâris :





« Pour NJ Pâris de la part de l'auteur ».




Cet ami de Danton et de Cloots, greffier du Tribunal révolutionnaire de Paris, fut plus connu sous son pseudonyme de Fabricius qu'il emprunta, comme son ami Cloots, à l'histoire des Républiques antiques.



 L'édition originale de cet ouvrage es­sentiel d'Anacharsis Cloots, dont les « divers autres écrits ne sont que des par­ties détachées » (Léonard Gallois, Histoire des Journaux et des journalistes de la Révolu­tion française, 1846) est d'une grande rare­té, et nous n'avons pu trouver aucun autre exemplaire enrichi d'un envoi autographe.

Notre exemplaire est adressé à un autre révolutionnaire témoin des grands procès de la Terreur qui se rendit célèbre en pré­venant Danton du complot de Robespierre et Marat, comme le racontera Victor Hugo dans Quatre-vingt-treize : « C'était le temps où l'expéditionnaire Fabricius Pâris regardait par le trou de la serrure ce que faisait le Comité de salut public. Ce qui, soit dit en passant, ne fut pas inutile, car ce fut Pâris qui avertit Danton la nuit du 30 au 31 mars 1794. »

ALLONS ENFANTS DE TOUTES LES PATRIES
Penseur révolutionnaire, Cloots est avant tout un penseur de la Révolution. Ce baron allemand dont la condition poli­tique, sociale et économique ne le por­tait pas naturellement à prendre le parti d'une révolution populaire et bourgeoise, fut pourtant le plus ardent défenseur de l'universalisme porté par la Déclaration des Droits de l'Homme. « Nul, [parmi les Allemands exilés] ne s'est plus senti investi d'une mission philanthropique universelle que Johann Baptist Cloots qui rêvait d'une Internationale républicaine, ouvrant en cela la voie aux grands théoriciens socia­listes de la génération suivante, le tailleur Wilhelm Weitling, l'instituteur Friedrich Mäurer, et bien évidemment Karl Marx qui eux aussi connurent l'exil à Paris. » (Thierry Feral, Plaidoyer pour une rénovation du discours historique sur l'Allemagne).
Pourtant, comme le note Albert Soboul, « le grand visionnaire que fut ce banquier cosmopolite demeure un incompris de l'histoire. Seul Jaurès, porté par sa cha­leur humaine et sa large vision de l'évo­lution historique, a compris, dans son His­toire socialiste de la Révolution française, ce que les anticipations d'Anacharsis Cloots pouvaient avoir de réaliste : ce grand vi­sionnaire n'était pas un rêveur. » (Soboul Albert. Anacharsis Cloots, l'Orateur du genre humain. In Annales historiques de la Révolu­tion française, n°239, 1980. pp. 29-58.)

L'ÉTRANGER DE LA FAMILLE
En réalité, la progressive suppression de Cloots de l'histoire de la Révolution est assez tardive. En 1792, l'aristocrate prus­sien prenant fait et cause pour la France des Sans-culottes est une des grandes cé­lébrités de son époque : « Les boutiques de tous les libraires de Paris sont tapissées de ce que les uns appellent les lubies d'Anacharsis, et ce que beaucoup d'autres admirent comme les prophéties d'un sage, d'un véritable ami de l'humanité. » Les journaux s'arrachent ses articles : « C'était même une bonne fortune qu'une lettre ou un discours de Cloots, presque tous remar­quables par l'originalité des idées qu'ils renfermaient, par le style, et surtout par sa constance à poursuivre l'objet de tous ses vœux, qui était la République Univer­selle. » (Gallois, ibid).
Dans son célèbre Précis historique de la Révo­lution françoise suivi des Réflexions politiques sur les circonstances, publié en 1792, Rabaut- Saint-Étienne dresse un portrait de Cloots qui nous éclaire sur l'aura de cet homme unique :
« Il a paru en France un de ces hommes qui savent s'élancer du présent dans l'avenir : il a annoncé que le temps viendrait où tous les peuples n'en feraient qu'un, et où les haines nationales finiraient ; il a prédit la Répu­blique des hommes et la nation unique ; il s'est fièrement appelé l'Orateur du genre humain, et a dit que tous les peuples de la terre étaient ses commettants ; il a prévu que la Déclaration des droits, passée d'Amé­rique en France, serait un jour la théologie sociale des hommes et la morale des familles humaines, vulgairement appelées nations. Il était Prussien et noble, et il s'est fait homme. Quelques-uns lui ont dit qu'il était un visionnaire, et il a répondu par ces paroles d'un écrivain philosophe (Soméri) : « On fe­rait un volume des fausses maximes accré­ditées dans le monde ; on y vit sur un petit fonds de principes dont fort peu de gens se sont avisés de reculer les bornes. Quelqu'un ose-t-il prendre l'essor et voir au-delà, il ef­fraye ; c'est un esprit dangereux, c 'en est tout au moins un bizarre. [citation placée en
exergue de la République universelle] »
Cloots, français d'âme depuis long­temps, voulait dès 1786, rattacher la rive gauche du Rhin à la France (Vœux d'un gallophile, 1786). Il fut d'ail­leurs fait citoyen d'honneur de la France le 26 juin 1792, avec George Washington, Jeremy Bentham, James Madison, Joseph Priestley, William Wilberforce, James Ma­cintosh, Alexander Hamilton et Thomas Paine (seul autre étranger, avec Cloots à avoir été élu représentant du peuple à la Convention).

L'ORATEUR DU GENRE HUMAIN
Mais c'est paradoxalement en tant qu'étranger qu'il contribuera à transfor­mer une Révolution nationale en principe universel.
Si l'instauration de la République en France, pourtant précédée par le Com­monwealth anglais et la Constitution amé­ricaine, prit immédiatement une valeur internationale et reste aujourd'hui encore le modèle de toutes les révolutions démo­cratiques à travers le monde, c'est grâce à cette universalité que lui ont reconnu des penseurs tels que Cloots, comme le relè­vera Jules Michelet :




« Cette révolution nécessaire du dix-huitième siècle donne en méta­physique Kant et la Raison pure ; en pratique, la tentative religieuse de [Gilbert] Romme et d'Anacharsis Clootz, le culte de la Raison. »
(Mi­chelet, Histoire de la Révolution fran­çaise, 1847)




Dans La République universelle, celui qui se clame « Orateur du genre humain », opère comme Brissot et sa lutte contre la traite des Noirs, ou Olympe de Gouges et sa défense des droits de la femme, une véritable rationalisation du mouvement révolutionnaire pour en extraire l'essence universaliste, dans la lignée de la pensée des Lumières.
C'est dans cette optique que lui vient l'idée de l'Ambassade du 19 juin 1790 : il se présente à la barrière de l'Assem­blée comme le porte-parole d'un Comi­té d'étrangers représentatifs de tous les peuples de l'univers souffrant de l'arbi­traire, et sollicite pour eux l'autorisation de participer comme tels à la Fête de la Fédération le 14 juillet suivant.
La délégation ne manqua pas de sur­prendre et d'enthousiasmer la majorité des députés par sa composition et son pit­toresque : on y reconnaissait des exilés po­litiques et certains des participants avaient revêtu leurs tenues nationales, parfois exotiques. Mais c'est bien sûr la harangue de Jean Baptiste Clootz qui porta l'émo­tion à son comble, nous explique le moni­teur. En effet, dans son discours, le Clèvois de naissance et cosmopolite parisien qu'il est, demande que la Fête de la Fédé­ration soit aussi celle du genre humain car « La trompette qui sonne la résurrection d'un grand peuple, clame-t-il, a retenti aux quatre coins du monde. Et les chants d'allégresse d'un cœur de vingt-cinq millions d'hommes libres ont réveillé les peuples ensevelis dans un long esclavage. » À cette fin, il réclame pour son comité le droit de paraître officiellement le 14 juillet : « Jamais Ambassade ne fut plus sacrée ; nos lettres de créance ne sont pas tracées sur le parchemin, mais notre mission est gravée en chiffres ineffaçable dans le cœur de tous les hommes. » Et surtout, justification suprême : « Quelles
leçons pour les despotes ! Quelle conso­lation pour les peuples infortunés... » Le président de l'Assemblée De Menou don­na son accord à l'« Orateur ». Au comble de l'émotion, le député Fermont proposa qu'on acclame la députation et Pétion exi­gea qu'on fasse imprimer et distribuer la harangue et la réponse du président, pro­position qui fut acceptée à l'unanimité. Si les conservateurs tentèrent de la ruiner par le ridicule, il n'en resta pas moins que l'opération permit de faire de la Fête de la Fédération une fête des Droits universels de l'homme ! » (François Labbé, Anachar­sis Cloots le Prussien francophile. Un philo­sophe au service de la Révolution française et universelle, 2000)
La République universelle pose les fonde­ments philosophiques de cette utopie in­ternationaliste et nourrira la réflexion des grands penseurs tels que Jean Jaurès, Karl Marx, Engels et d'artistes et d'écrivains de toutes nations dont Joseph Beuys (pour qui Anacharsis est « un autre lui-même qui l'a précédé dans sa révolte, sa quête et son anticonformisme »), Italo Calvino (Le Baron perché étant une allégorie du philosophe) et surtout Herman Melville.
C'est dans Moby Dick que l'on découvre la première occurrence de Cloots sous la plume de l'auteur américain pour dé­crire la composition de l'équipage du fa­meux baleinier, qualifié de « délégation d'Anacharsis Cloots de toutes les îles de la mer et des quatre coins du monde, accom­pagnant le vieil Achab sur le Péquod pour aller témoigner des torts du monde de­vant cette barre d'où peu d'entre eux sont revenus ».




« An Anacharsis Clootz deputation from all the isles of the sea, and all the ends of the earth, accompanying Old Ahab in the Pequod to lay the world's grievances before that bar from which not very many of them ever come back. »
(Herman Melville, Moby Dick)




La référence n'est pas anodine comme le montrera le philosophe Cyril Lionel Robert James : « Ses candidats à la République universelle sont liés par le fait qu'ils travaillent ensemble sur le même baleinier. Ils forment une fédération mon­diale d'ouvriers industriels modernes ». François Labbé considère même cette ré­férence comme « une clé de la métaphore « mobydickienne » ; la quête d'Achab et l'action d'Anacharsis magnifiées l'une par l'autre. »




Auteur d'une des plus belles utopies humanistes, Anacharsis « engage sa plume et sa vie dans les luttes d'idées du dernier quart du siècle [et] illustre le passage de la pensée des Lumières à l'activisme révolutionnaire [...]. Sa ligne politique est claire : parvenir à la République universelle, seul cadre pos­sible de son ambition philosophique, et in­diquer à l'homme les voies de sa liberté. »




Cette unique dédicace d'Anachar­sis sur son œuvre capitale à Fabri­cius Pâris, futur greffier du procès de Marie-Antoinette, constitue un inestimable témoignage de la courte vie de cet humaniste révolu­tionnaire, guillotiné à 34 ans, et de l'émergence d'une pensée mondia­liste :
« Insistons éternellement sur la fusion par­faite, sur la confédération des individus, sans quoi les corps reparaîtront avec l'es­prit de corps. Et pourquoi les corporations sont-elles dangereuses ? C'est parce qu'il est plus difficile de les contenir sous la puissance légale, que les simples individus. L'ambition individuelle est aussi ardente que l'ambition collective ; mais la faiblesse de l'une change les disputes particulières en simples procès, pendant que la force de l'autre lui permet d'entreprendre des guerres sanglantes et rarement interrom­pues. Les corps provinciaux et les corps na­tionaux sont les plus grands fléaux du genre humain. Quelle ignorance, quelle barbarie de nous parquer en différentes corporations rivales, pendant que nous avons l'avantage d'habiter une des moindres planètes de la sphère céleste ! Nous multiplions nos ja­lousies, nos querelles, en divisant l'intérêt commun, la force commune. Un corps ne se fait pas la guerre à lui-même, et le genre humain vivra en paix, lorsqu'il ne formera qu'un seul corps, la Nation Unique »

Provenance : Nicolas-Joseph Pâris, dit Fabricius (commissaire national à Lille et greffier du Tribunal révolutionnaire à Pa­ris), puis bibliothèque Henri Joliet avec son ex-libris à la devise « Plus penser que dire » encollé sur la première garde.



 



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