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Autographe, Edition Originale
VENDU
Réf : 54821
Guillaume APOLLINAIRE
Méditations esthétiques. Les Peintres cubistes
Eugène Figuière & Cie, Paris 1913, 18,5x24cm, broché sous chemise et étui.
Édition originale sur papier courant en dépit d'une mention de deuxième édition, poinçon du service de presse sur le deuxième plat.
Précieux envoi autographe signé de Guillaume Apollinaire : « à Lucien Rolmer, au chantre, au psychologue, son ami ».
Ouvrage illustré de 46 portraits et reproductions d'œuvres de Georges Braque, Pablo Picasso, Juan Gris, Francis Picabia, Marcel Duchamp…
Comptant parmi les rares défenseurs du cubisme dès ses débuts, Apollinaire œuvre à sa diffusion et sa compréhension à travers ses chroniques et préfaces dont celle du catalogue de l'exposition du Cercle de l'art moderne du Havre, intitulée Les Trois vertus plastiques, repris en introduction des Méditations esthétiques. A l'insu du poète, l'éditeur Eugène Figuière met en exergue le sous-titre Les Peintres cubistes. Cette modification opportune sera déterminante pour la réception de l'ouvrage. Ainsi, au lieu de simples « méditations », le texte acquiert, pour les lecteurs, le statut de véritable Manifeste du cubisme et suscite à ce titre des réactions parfois violentes (plus encore de la part des milieux avant-gardistes que des opposants naturels à la peinture moderne). Mais il devient, par la même occasion, un des premiers écrits d'importance sur le cubisme, « définissant les caractères propres au nouveau mouvement pictural : son ‘‘climat'' spirituel, ses ambitions, sa nécessité historique » et sa portée internationale. Un mois plus tard, Apollinaire faisait paraître Alcools, avec en frontispice un portrait cubiste de l'auteur par Picasso.
Grand ami d'Apollinaire, le poète Lucien Rolmer, d'un mois son aîné, n'a pas suivi le même parcours esthétique que son compagnon de bohème.
D'expression plus classique, Rolmer est sans doute moins sensible que le futur poète d'Alcools et de Calligrammes aux formes artistiques nouvelles que défend Apollinaire. Cependant les deux poètes partagent une ambition esthétique commune, la recherche d'un nouveau souffle créatif. C'est au nom de cette quête de ce qu'il nomme « la Grâce », que Rolmer fonde une école littéraire et une revue, La Flora, Revue de la Grâce dans les Lettres et dans l'Art. Apollinaire, de son côté, cherche une expression plus radicale qu'il trouve notamment dans le cubisme et dans les arts primitifs. Ainsi adresse-t-il au « chantre » de la Grâce ces Méditations esthétiques sur des œuvres dont les « vertus plastiques : la pureté, l'unité et la vérité maintiennent sous leurs pieds la nature terrassée ». Ce faisant, il interroge implicitement le « psychologue » sur cette expression nouvelle « qui n'est pas un art d'imitation, mais un art de conception qui tend à s'élever jusqu'à la création ». L'année précédente déjà, il initiait son ami à l'Art Nègre en l'invitant à nourrir son « art gracieux » de la contemplation d'une grande statue métallique dahoméenne représentant le dieu de la guerre, « l'objet d'art le plus imprévu et un des plus gracieux qu'il y ait à Paris ».
Etrange présage de leur destin tragique commun, puisque c'est la guerre, dont ils surent pourtant décrire l'absurde beauté, qui emporta pareillement les deux poètes. En mai 1916, refusant sa reddition, Lucien Rolmer, simple soldat, est exécuté d'une balle dans la tête. Deux mois avant, le sous-lieutenant Kostrowitzky était atteint par un éclat d'obus dans le crâne auquel le « poète assassiné » ne survécut que peu de temps.
Dans son dernier ouvrage, Le Flâneur des deux rives, paru l'année de sa mort, Apollinaire évoque ses pérégrinations parisiennes avec son ami disparu : « La dernière fois qu'avant la guerre, j'ai passé rue Berton, c'était il y a bien longtemps déja et en la compagnie de René Dalize, de Lucien Rolmer et d'André Dupont, tous trois morts au champs d'honneur ».
Notre exemplaire est présenté sous une chemise à rabats en demi maroquin vert, plats de papier peigné, date dorée en queue, dos lisse et un étui bordé de maroquin vert, plats de papier peigné.
Précieuse et émouvante dédicace d'un poète à l'autre, témoin de l'effervescence intellectuelle et artistique d'une jeunesse bientôt sacrifiée au Léviathan de 14-18.
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